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  • Photo du rédacteurMarie

Le Join-Up : pour ou contre?


Levez la main celui ou celle qui n’a jamais essayé « le jeu » de chasser son cheval dans un rond de longe ou bien encore dans un manège, dans le but que le cheval veule bien connecter avec nous et désire rester à nos côtés! Cette attitude de prédateur appliquée sur un animal de proie n’est pas aussi inoffensive qu’elle en a l’air au premier abord. Sachez que cette méthode d’apprentissage par renforcement négatif, si mal comprise/appliquée, comporte son lot de dommages collatéraux… Et pour la relation/connexion entre humain et cheval, et bien, on repassera…


Introduction

C'est Monty Roberts, un « chuchoteur américain » qui a institué et popularisé l'approche du Join-Up afin de débourrer les chevaux, les rétifs, les jeunes, les mal partis, etc. Pour ceux et celles qui ne la connaisse pas, cette approche consiste en gros à chasser le cheval dans un round-pen au galop tout en prêtant attention aux comportements du cheval chassé et en réagissant selon ces comportements; le but de l’exercice étant que le cheval apprenne qu’il doit rester à nos côtés, calme et soumis, sinon il sera continuellement chassé à toute allure dans le rond de longe. Sans entrer plus dans les détails de cette méthode ici, méthode qui a quand même fait ses preuves pour débourrer rapidement les chevaux, on peut toutefois affirmer qu'il peut y avoir passablement de dommages collatéraux qui peuvent découler de la mauvaise application de cette méthode. Pourquoi? Premièrement, M. Roberts est un maître dans l'observation du cheval, et du timing du bon geste à faire au bon moment... Ce qui est plus ou moins le cas de monsieur et madame Tout le monde qui se lance à l’improviste dans cette méthode, avec souvent pour but premier de gagner du temps... Ce qui entraîne de l'incompréhension de la part des chevaux et surtout, des accidents (par exemple : chevaux qui défoncent la clôture car trop de pression) car le timing est souvent absent, déficient ou inconstant. Toutes sortes de méthodes plus ou moins éthiques en sont dérivées aujourd’hui, et avec elles, des gourous en horsemanship se vantant de débourrer des poulains en 30 minutes… Du gros n’importe quoi!

Renforcement négatif ou punition positive

La première chose qu’il faut souligner par rapport à cette méthode, c’est que tout renforcement négatif appliqué sans discernement et sans excellent timing devient en fait un mode d’apprentissage par punition positive! Pour Zeitler-Feicht (2012), « la punition positive est l’ajout d’un stimulus déplaisant lorsque le cheval commet quelque chose de non désirable »[1]. Cela remet donc en cause le bien-être animal du cheval pendant cet exercice… De là à dire que la méthode est non éthique… il y a qu’un pas, que je franchirai pour le bien de l’animal. De plus, aucune observation faite sur des chevaux sauvages ne confirme que les chevaux se pourchassent aussi longtemps entre eux… Par exemple, Warren-Smith et McGreevy (2008) ont plutôt observé que les juments en groupe semi-féraux passent à peu près 0,73 % de leur temps à pourchasser les jeunes…[2] On est donc loin de ce chiffre évidemment, si on veut comparer le Join-Up à ce que les chevaux font de manière naturelle, entre eux.

Hors du round-pen, point de salut; la relation ne peut être forcée...

Parlons « relations » maintenant. On désire tous et toutes un cheval qui a la motivation première de demeurer à nos côtés sans être forcé de l’être, et qui semble apprécier plus que tout notre présence (qui nous « aime »), et ce, le plus rapidement possible! Les réseaux sociaux regorgent d’humains souriants et épanouis et de chevaux semblant galoper ensemble en parfaite harmonie, ou encore de jeunes filles qui jouent sur la plage en liberté avec leurs équidés, tous crins au vent… C’est le rêve secret et ultime de bien des gens… Côté plus terre à terre maintenant : Kruger, un chercheur en éthologie et son équipe, voulait savoir si le Join-Up favorisait cette approche, où un lien entre la personne et son humain est tellement fort qu’ils sont capables de travailler en liberté dans un grand pré ou tout endroit en dehors du round-pen. Ils ont donc étudié « l’effet « Join-up » sur la relation humain-cheval[3]. Ils en ont conclu que, même si dans le round-pen, le cheval semblait connecté à l’humain, ce « simili » lien n’existait plus hors du round-pen… Ce qui porte à croire, qu’en effet, cela n’améliore en rien votre relation avec votre cheval.

Au mieux donc, vous lui faites faire de l’exercice, au pire, vous le conditionnez à vous éviter, car vous devenez un « agent du renforcement négatif » à son meilleur! Cela porte à réfléchir! Je vous invite donc à vous questionner lorsque quelqu’un vous recommandera cette technique! Bon printemps!

[1] Zeitler-Feicht, M.H. 2012. Manuel du comportement du cheval : Origine, traitement et prévention des problèmes. (C. Lelong trad.). Paris, FR: Ulmer.

[2] Cassoret, M. 2017. Notes de cours. Éthologie équine. AZCA.

[3] Kruger, K. 2007. Behaviour of horses in the « Round Pen Technique ». Applied animal Behaviour Science. 104 :162-170.

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